dimanche 16 septembre 2012

La nuit des temps, René Barjavel

Amour éternel et questionnement social sur fond de décor stérile science-fictionnel

Un roman hybride à la croisée de la science-fiction et de la tragédie antique.
Une oeuvre bouleversante qui soulève de nombreuses questions. Un regard étranger sur une planète jugée brutale, sauvage, barbare. L'héroïne, Eléa, a connu une sorte d'Eden il y a 900 000 ans sur Terre. Le héros (une homme actuel) analyse cette période comme étant l'enfance de l'homme. Mais le passé n'est pas forcément synonyme de balbutiements de l'homme à tous points de vue : technologique, social, spirituel. Et cette héroïne surgie d'un passé idyllique nous interroge sur notre présent et ce que nous considérons être "naturel" et "bien" (façons de se nourrir, de vivre ensemble, de se partager des territoires, de travailler, de communiquer, et d'aimer). Elle apporte une certaine réflexivité déconcertante au lecteur : qu'est-ce que cela dit de notre évolution en tant qu'hommes, en tant que sociétés, en tant qu'êtres pensants?

Entremêlée à ces questions demeure la thématique de l'amour éternel. Vision sublimée de l'amour, vision de ce qu'il "devrait" être, ou vision aveuglée et bornée? L'histoire qui relie Eléa à son passé tisse un fil tout au long de l'histoire qui déploie toutes les facettes d'un amour sans barrières, inconditionnel et exclusif mais non égoïste, éternel. Doit-il être vécu et anticipé ainsi? Doit-il transcender toutes les autres questions, même quand l'on doit faire un choix entre cet amour et l'avenir de l'humanité?

Une oeuvre vraiment belle, lyrique et poétique, mais aussi profonde et poignante qui laisse son lecteur en proie à de nombreuses interrogations.



"Amour. (...) Depuis que je t'ai vue vivre auprès de Païkan, j'ai compris que c'était un mot insuffisant. Nous disons " je l'aime ", nous le disons de la femme, mais aussi du fruit que nous mangeons, de la cravate que nous avons choisie, et la femme le dit de son rouge à lèvres. Elle dit de son amant " Il est à moi. " Tu dis le contraire " Je suis à Païkan ", et Païkan dit : " Je suis à Éléa. " Tu es à lui, tu es une partie de lui-même. "

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire