mardi 28 décembre 2010

Rencontre avec Simon Albo

Jeune artiste autodidacte, Simon Albo vit près de Perpignan et produit ici et là où le vent le porte : Saint-Estève (café temporaire redécoré, défilé de mode...), Londres, Reykjavik (exposition photo), l'art n'a pas de frontières pour lui! Polyvalent, il peint, compose, chante, écrit, et crée des vêtements. Son art est impulsif, déchiré, floral, multicolore et multiforme. Conjuguant les contraires avec brio, il s'exprime sans carcan, utilise et mélange les matières, les couleurs et les idées. D'une spontanéité et d'une liberté folles, il encourage ses semblables à s'affranchir des contraintes qu'ils s'imposent. S'il y a un message à retenir de cette interview, c'est bien celui-ci : « Tout est possible! » Vous dit-il avec un aplomb déconcertant. Et on le croit. Rencontre.

Simon, d'où tires-tu ton inspiration?

C'est l'énergie des gens qui m'inspire, je fonctionne beaucoup au ressenti, à la transmission, à l'euphorie. Je déteste les bains de foule mais certaines personnes me donnent envie de rester en vie artistiquement. Je serais sur une île déserte, je ne serais pas très productif. J'ai besoin de calme pour créer, le silence et l'espace me réénergisent. Quand je vais quelque part, ma vision ne doit pas être fermée, je suis un peu claustro. La fatigue m'inspire de même beaucoup, je crée principalement la nuit. Et la musique! quand j'entends des voix, des sons, ça me réénergise aussi.


As-tu des influences artistiques prégnantes dans ton travail?

Dernièrement oui, une artiste que je considère comme ma grand-mère, Brigitte Fontaine. Elle me permet de dire « fuck », de pas se laisser emmerder. (Simon a été contacté par Brigitte Fontaine pour lui dessiner un vêtement.) J'adore les stylistes qui collaborent avec des musiciens, qui font des tenues de scène. Il y a du potentiel par rapport à la timidité grandissante des gens. Aujourd'hui, les gens sont morts de trouille! Quand je suis allé en Islande, il y avait une véritable folie créatrice. La vie ne tient qu'à un fil, les volcans nous le rappellent. Tout le monde écrit, peint, compose... Il y a aussi beaucoup de minimalisme, ils ne font pas ça pour être considérés comme des artistes, ils le font juste. C'est comme ça que je fonctionne. Pendant le festival Airwaves, il y avait de la musique pendant une semaine non-stop, tout était dans le partage, sans a priori. Ces artistes s'exprimaient vraiment.


Brigitte Fontaine.

(https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhZSUaGk0BoyDP7kZj1onnM7Z9NI5AHyhkm2fb-WJt6X1BYOWuvt471G-swktITFQPhwfZwR-VO07JdV2CY0DyraCaOpBtWc_-3Sc0YfGpR3BPbiTn4kwCblwJDn8eQTm1p6WPFJRSgm7D9/s400/fontaine5.jpg)

Le festival Airwaves à Reykjavik.

(http://www.passportmagazine.com/blog/uploads/iceland-airwaves.jpg)

Quelle est ta relation à l'art?

L'art, c'est naturel.



Tu es autodidacte, touche à tout, comment en-es tu venu à la musique, à la peinture et à la mode?

C'est du bricolage. J'ai fait une omelette avec mes oeufs... c'est pas sexuel! C'est comme un gosse avec un sac de billes qui décide de jouer avec toutes les billes qu'il possède.


Ton œuvre présente un caractère très psychédélique, ça représente quoi pour toi?

Je ne fais pas ce que je fais pour paraître psychédélique. C'est plutôt onirique, je crée beaucoup la nuit, comme quand tu fais des rêves tripés. Je ne prends pas de drogues pour m'inspirer, c'est mon intérieur qui décide de ce qui se passe.


Exprimes-tu différents univers à travers tes différents médium artistiques? Quel est le point commun entre tes œuvres et les sphères artistiques choisies pour les exprimer?

Le point commun est onirique. La musique c'est simple car c'est plus diffus, c'est aérien. Ca vient tout seul. Ce qui me demande le plus d'énergie, c'est la peinture. Matériellement, c'est ce qui me coûte le plus. Ce qui me nourrit le plus, c'est la musique, notamment parce que je collabore avec plusieurs personnes. En peinture, il faut faire super attention à ne pas s'enfoncer dans la toile. Ca te prend. Je tiens à finir mes peinture en une fois, car c'est un instant de pulsion.



Il y a un tableau qui m'intrigue! J'aime beaucoup le Mickey atomisé, raconte-moi la naissance de cette oeuvre. Y avait-il une intention particulière derrière?

Il n'y avait pas d'intention au départ, ça se crée au fur et à mesure, mais elle était peut-être inconsciente. Ce Mickey représente une teuf qui a mal tourné. Il est KO, maculé, cloué, sous exta.


Tu n'as pas choisi Mickey par hasard.

C'était la peluche de mon enfance.



T'as destroy ton enfance là.

L'enfance c'est trash.



Pourquoi?

On est innocent, trimballé à droite à gauche, on ne prend pas en compte notre avis. Tout ça car un gosse ça ne sait pas parler ni marcher, alors il est considéré comme sénile! La société d'aujourd'hui ne considère les gens que lorsqu'ils ont un travail. Ceux qui n'ont pas de situation stable comme les sdf ne sont pas pris en compte. J'ai en tête des films futuristes où les gens portent les mêmes fringues, vont dans la même direction et ne dépendent que d'une tour immense, comme une énorme borne internet. Si je n'étais pas créatif, je ne serais plus là. Je ne servirais à rien. Ca me sauve. Les gens qui n'ont pas d'énergie dans leurs mains, ça me fait peur pour eux. Quand j'étais petit, j'étais sûr d'être un extra-terrestre.


Tu sembles vouloir révolutionner la matière à travers tes créations textiles atypiques, tes chaussures en lamelles de jeans, ton détournement des matières pour leur donner une nouvelle fonction, qu'est-ce que tu cherches à exprimer à travers ces vêtements atypiques?

Quand les gens sont foutus, perdus, dans la merde, qu'ils se demandent quoi faire de leur vie, il faut voir que rien n'est jamais perdu, aller de l'avant, se faire confiance et faire confiance en l'avenir. La réflexion que j'aimerais communiquer aux autres c'est de rester optimiste. Et puis j'adore recouvrir les choses. Je travaille beaucoup dans le plissé, et les formes boule. Ca fait comme un cocon, une protection.


Pourquoi une protection?

Je trouve ça chaleureux. Je veux que les gens soient bien dans leurs vêtements, qu'ils portent des matières sympas et adaptables à leur corpulence, auxquelles on peut donner le mouvement qu'on veut, qu'il n'y ait pas de jugements. Il y a assez de contraintes et de stupidités ignobles.


Pourquoi y a-t-il des contraintes dans le vêtement?

Je ne suis pas historien, mais je dirais qu'à l'époque des grandes découvertes, les hommes voulaient à tout prix se différencier des animaux avec des vêtements hyper moulés, hyper structurés.


Tes vêtements m'évoquent l'idée d'un soldat de paix, entre les armures, les protections en osier, matelassées, les capes, les fourrures mixées avec des matières légères et vaporeuses, ces surcouches et ces protections, que veulent-elle dire?

Ca correspondait à la démarche du moment : représenter la chrysalide. Le jour où le papillon va sortir, ça va être fou! Dans ma musique, c'est pareil. Il y a très peu de paroles, j'écris beaucoup, mais ce que les gens écoutent ce ne sont pas des mots, c'est une forme de sculpture musicale.



le plissé, sensuel et vaporeux.




les "boucliers" molletonnés ou en osier (photo ci-dessous)



Au niveau de tes tableaux, ils semblent très organiques, très portés sur l'expérimentation de la peinture elle-même, cherches-tu à redéfinir notre relation à la peinture?

Au début oui, j'en avais besoin. Au fur et à mesure j'ai apporté une réflexion. Je n'ai pas d'objectifs, juste des trucs un peu tripés, 'tortionnés'. En ce moment je suis dans une approche un peu plus sexy, des robes légères, assez courtes, échancrées au niveau du fessier, qui révèlent la poitrine... Ces robes ne se portent qu'avec des leggings. Elles attirent l'oeil, non pas dans le sens glamour-potiche, mais elles fonctionnent comme une accroche. J'habille mes vêtements de hameçons, je me lance à la chasse! Je veux que les gens regardent. Ce n'est pas du trash pour le trash. Je veux faire dans le glamour.


Beaucoup de tes tableaux évoquent aussi une certaine violence : explosion du rouge, éléments sexuels détériorés, bougie explosée faisant pensée à des boyaux pulvérisés, monstres de sang et de griffes...

Ce sont des impulsions que je transmets à travers l'art. Je recherche aussi beaucoup les émulsions chimiques, j'utilise des médicaments effervescents. Une fois j'ai testé avec du jambon! En fait j'adore le vivant. Pour moi une peinture réussie, c'est celle qui continue à évoluer.

Pâte à sel sur toile.

Comprimés effervescents.

Cire fondue et oeuf sur toile.

Bougie fondue sur toile.

Une note florale...


Plus qu'un message, c'est un hymne à la vie?

Ouais, grave.


Quel est ton idéal de vie?

Continuer à faire ce que je fais, trouver des terrains aptes à la création, continuer de faire des choses constructives. J'ai fait un clip à Bruxelles, j'ai tourné à Londres... les choses sont tout à fait possibles! Tout est possible! Artistiquement, j'ai toujours fait ce que je voulais. La vie est simple! Je vis sans contraintes, sans pour autant tomber dans le cliché hippie. J'ai connu des gens qui voulaient changer le monde et blablataient avec leur guitare. A part chanter des chansons sur l'herbe, rien ne changeait. C'était absurde. Je croyais que c'était la liberté, ça ne l'était pas. C'était juste une forme d'extrémisme.


Merci pour tout Simon!!!


dimanche 26 décembre 2010

La collection "Ghettos" de Tom Hunter

Photographe anglais né en 1965 dans le Dorset, Tom Hunter capture la vie quotidienne de ses voisins et amis. Il a élu un quartier populaire de Londres pour domicile et terrain artistique. La communauté nomade demeure un de ses sujets de prédilection. Il pénètre dans ce lieu de vie et nous livre un magnifique témoignage. Intimes et réalistes, ses photographies nous convient dans un univers à la fois chaotique et chaleureux. Il nous offre à travers son album consacré aux ghettos un poignant témoignage de ces vies aux conditions difficiles mais aussi de ces vies indépendantes. Il invite le spectateur dans les maisons et met en lumière les êtres qui les peuplent. Les pièces sont chargées, témoins des multiples voyages. L'oeil est titillé de toutes parts, mais le point focal est dirigé vers l'être qui vit en ces lieux. Il nous regarde franchement, et ses murs parlent pour lui. Tentant une douce intrusion dans un espace intime, Tom Hunter nous plonge dans différentes atmosphères avec simplicité et grande sincérité. Réaliste et enivrante, cette collection fait voyager dans des ailleurs pas si lointains. Stimulés par la vue des cloisons-carnets de bord, des feux vifs, des mélanges de textures, nos sens sont constamment en éveil. Plus qu'un mode de vie, ces photos mettent en lumière des personnalités et des sensibilités. Plus que de simples témoignages réalistes, elles nous invitent à goûter la poésie du quotidien.

CV

Je n'aspire qu'à écrire,
Ouvrir un agenda là pour noircir
Une à une les pages de ma vie
Reliées par une viscérale envie :
Naviguer entre les moutures,
Apprivoiser l'art et la culture.
La plume trace les desseins de l'esprit,
Itinérante hirondelle qui jamais ne se rassasie,
Sanctuaire des secrets humains
Tous j'aimerais les goûter
Et en extraire quelques mots sur un papier...